Comprendre la Diaspora...

CollectifVan “Diasporayı anlamak” yazısını Fransızcaya çevirmiş, Nouvelles d’Armenie de oradan iktibas etmiş. Burada da dursun istedim.

Comprendre la Diaspora...
par Rober Koptas

vendredi13 novembre 2009, par Stéphane/armenews

Info Collectif VAN - www.collectifvan.org - A n’en pas douter, les lignes bougent en Turquie. Les minorités cachées, voire niées, ainsi que des démocrates turcs et kurdes, se font entendre. Après les voix claires et dignes d’Ayse Gunaysu (militante turque des droits de l’homme) et de Talin Suciyan (journaliste arménienne d’Istanbul), du député kurde Selahattin Demirtas (dirigeant du Parti kurde DTP) qui a, en pleine séance au Parlement turc, pris à partie le gouvernement pour manipulation et négation des faits concernant les massacres des Arméniens, c’est au tour de la voix de l’Arménien de Turquie, Rober Koptas, de s’élever avec force pour condamner l’amalgame fait dans la presse turque, entre l’ultranationalisme turc et la diaspora arménienne. Dans un passé relativement proche, la diabolisation de la diaspora arménienne était souvent relayée par une communauté arménienne de Turquie, prise en otage et devant faire acte d’allégeance.

Aujourd’hui, certains Arméniens d’Istanbul, ainsi que leurs proches amis turcs, ont donc choisi, avec un courage qu’il faut saluer ici, de prendre la défense de la diaspora. Et ce faisant, Rober Koptas va plus loin et souligne l’injustice historique, le négationnisme de l’Etat turc, la spoliation des terres et des biens.

On souhaite que les journalistes, homme politiques, intellectuels, Turcs et non-Turcs, tous se sentent interpellés par ces discours de membres d’une minorité opprimée de Turquie et celui de démocrates turcs et kurdes. Des femmes et des hommes qui ont du cran et qui n’hésitent pas à se mettre en danger, pour réagir et imposer le respect dû aux descendants des rescapés du génocide arménien de 1915, engagés corps et âme dans une lutte contre l’injustice et le déni. En cela, elles et ils défendent les valeurs mêmes de l’humanité tout entière. Le Collectif VAN vous propose la traduction de cet article en turc paru le 19 octobre 2009.

Comprendre la Diaspora...

19 Octobre 2009 ROBER KOPTAS

Rober Koptas, un Arménien de Turquie, attire l’attention sur les raisons psychologiques du refus des protocoles signés entre la Turquie et l’Arménie.

“Ma conscience m’appelle à témoigner : moi, je suis la voix des déportés qui gémissent” Armin T. Wegner

Cet article a été écrit en mettant de côté, l’espace d’un instant, l’ambiance optimiste créée suite aux protocoles signés, afin d’attirer l’attention sur la perception dominant en Turquie, au sujet de la nature nationaliste et discriminatrice de la diaspora. Je sais que ce n’est pas un sujet agréable pour un dimanche, mais c’est justement le moment, en pleine lune de miel, de parler des vérités que l’on fait semblant d’ignorer ; car l’avenir sera ce que l’on en fait aujourd’hui ; la solidité des constructions dépendra des briques que l’on va poser l’une sur l’autre. Sans doute, la résolution des problèmes entre les deuxs pays, la normalisation de leurs relations, l’initialisation d’une période de dialogues, sont porteurs d’espoir pour l’avenir. Il est évident que toute personne partisane de la paix, soutient ces démarches, et souhaite que cet état d’absence de relations touche à sa fin, que les relations entre les deux peuples se normalisent, que les générations futures grandissent loin de la haine.

Toi, la méchante diaspora

Cependant, il n’est pas possible de réduire la vraie réconciliation entre les deux peuples, aux traités signés entre les Etats. De ce fait, la prise en compte et le suivi de la tension des dynamiques en Arménie, en Turquie et dans la Diaspora, ont une importance vitale. La perception des réactions de la diaspora vis-à-vis des protocoles, et son écho en Turquie, plus particulièrement dans le monde politique et dans les médias, nous prouvent la force de l’entêtement et l’insistance à ne pas comprendre la vérité de la diaspora et son état psychologique. Ceci montre que la Turquie, les habitants de Turquie, ne veulent pas vraiment parler avec les Arméniens et qu’ils ne sont pas prêts à cela. Certes, les réactions les plus fortes et les plus virulentes sont venues de la diaspora. En protestant par des meetings, par des campagnes, les Arméniens dispersés aux quatre coins du monde, ont crié leurs souhaits de ne pas voir signer les protocoles. Cette opposition forte a complètement fait remonter à la surface les préjugés existants contre la diaspora. L’attitude de la diaspora a été utilisée, exploitée, pour démontrer encore une fois, combien les ‘Arméniens’ sont nationalistes, combien ils sont inconciliables, à quel point ils sont radicaux, à quel point ce sont des faucons, des ennemis des Turcs.

Comme si ces réactions [de la diaspora] n’avaient aucun rapport avec l’entêtement de la Turquie à refuser d’affronter son passé, tous les sentiments néfastes à l’encontre des Arméniens, ont été exprimés sous le masque de la critique de la diaspora.

L’ouverture des frontières est une avancée attendue, rêvée depuis tellement d’années. Mais le bonheur de se rapprocher de ce rêve ne doit pas écarter l’injustice historique de notre perspective ; il ne faut pas la cacher sous une couverture. Nous devons avoir la responsabilité de réagir face aux efforts d’étouffer les voix de la diaspora, c’est-à-dire la voix des Arméniens exilés de leurs terres, de ceux qui ont été forcés de vivre en diaspora. Nous devons montrer notre objection. Faire des déclarations caressant la fierté nationale des Turcs dans le sens du poil, en disant que les Turcs sont des gens de bonne volonté, qu’ils sont tolérants, et dire en contrepartie que les Arméniens sont rigides, qu’ils ont la tête dure, et tout ceci sans prendre en compte les facteurs psychologiques et l’arrière-plan historique qui sont à l’origine des réactions de la diaspora, n’apporte aucune solution. Titrer « La diaspora a perdu la tête » comme l’a fait le quotidien Taraf, ne fait qu’attiser le feu et accentuer encore plus les injustices.

Quelle conscience peut accepter ceci ?

Ceux qui, en Turquie, osent parler contre la diaspora, devraient, s’ils avaient un petit peu de conscience, trouver les réponses aux questions suivantes avant de prononcer le mot ‘diaspora’. Il leur serait même utile de réfléchir quarante fois avant de parler :

Comment la diaspora s’est-elle formée ? Sans les événements de 1915, ces gens-là seraient aujourd’hui des citoyens de la République Turque, ces gens-là ont été dispersés aux quatre coins du monde, à partir de ces terres : de Sivas, de Malatya, de Diyarbakir, de Tekirdag, de Samsun et ceci à cause d’une injustice inhumaine, subie sur ces terres. Quelle conscience peut accepter de parler de la diaspora sans tenir compte de toutes ces vérités ? Quelle conscience peut oser parler de la diaspora en oubliant que ces gens-là sont les enfants des générations qui ont survécu aux massacres, aux déportations, qu’ils ont été les témoins de l’assassinat de leurs propres parents, de leur viol, qui ont grandi dans les orphelinats, dans la misère, à Alep, au Liban, qui ont été exploités dans les pays occidentaux comme main-d’œuvre bon marché, qui se sont accrochés à la vie en s’efforçant de faire vivre leur langue, leur religion et leur culture, qui ont résisté face à l’assimilation, à ce qu’on appelle un « génocide blanc » ?

Le langage qui diabolise

Comment peut-on oser parler de la diaspora ? lls [les Arméniens de la diaspora] ont été déplacés de leurs maisons, de leurs terres, leurs biens ont été spoliés, leurs écoles, leurs églises ont été pillées, détruites, leurs propriétés ont été utilisées comme bâtiments officiels, comme étables, comme dépôts de munitions. Les biens abandonnés par ces gens-là ont été saisis et spoliés sans aucun remord, et vous en avez pris possession tranquillement, alors quelle conscience peut encore oser accuser la diaspora ? Alors que, depuis des dizaines d’années, la Turquie nie les souffrances vécues, qu’elle essaye d’effacer les traces de l’existence arménienne sur ces terres, on dit à ces gens-là en les regardant dans les yeux “Non, vous n’avez pas été assassinés, vos biens n’ont pas été spoliés, au contraire vous avez tué, vous étiez des traîtres, vous avez vendu votre terre !” Quelle conscience peut encore oser parler de la diaspora ? La diaspora dépense toute son énergie pour la reconnaissance de toutes ces souffrances depuis des dizaines d’années, pour que l’opinion publique internationale entende les vérités niées. Pour cette raison, elle est condamnée à vivre dans un état de folie. Les enfants aliénés d’un peuple à la débandade, sont condamnés à veiller devant le cadavre de leur culture inerte, parce qu’elle a été déracinée. Alors que deux Arméniens qui se rencontrent ne peuvent même pas communiquer correctement dans leur langue maternelle, comment peut-on critiquer leur pauvreté de vision politique, leur incapacité à être clairvoyants, quelle conscience peut oser se plaindre de la diaspora ? On peut encore trouver d’autres questions du type de celles ci-dessus. Malgré toutes ces questions et leurs réponses, on peut défendre la thèse que l’attitude de la diaspora n’est pas correcte et que sa stratégie n’est pas bonne et qu’on respecte cette vision. Mais la diabolisation délibérée de la diaspora comme l’a fait le quotidien Taraf dans sa manchette « Bahçeli ou Diaspora, même combat » [Nota CVAN : Bahçeli est le leader du MHP, mouvement ultranationaliste turc], ne peut être expliquée, après tant de souffrances, que par l’immoralité. Face à cette immoralité, face à cette perversion, on peut seulement, pour exprimer notre impuissance et notre désespoir, dire « Que des pierres grandes comme la diaspora tombent du ciel sur votre tête ! ». [Nota CVAN : malédiction populaire qui fait allusion à la fin du monde].

Traduction du turc : S.C. pour le Collectif VAN - 02 novembre 2009 - 09:00 - www.collectifvan.org

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